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Liberté et pouvoir

Photo du rédacteur: Stevens AzimaStevens Azima

On peut être tout-puissant sans être libre. La liberté, ce n'est pas le pouvoir. Laissez-moi vous raconter l'histoire de Hatchepsout.


Hatchepsout était la fille du pharaon Thoutmosis Ier. Quand ce dernier devint pharaon d'Égypte au XVIème siècle avant l'ère commune, Hatchepsout était âgée de moins de 10 ans.


Son père remarqua son intelligence et décida de lui offrir toutes les opportunités de réaliser son plein potentiel (éducation de qualité, voyage, etc.).


Elle épousa son demi-frère, Thoutmosis II, devenant donc plus tard Grande épouse royale.


Thoutmosis II obtint un fils de sa deuxième femme. Ce fils deviendra Thoutmosis III.


Le règne de son père ayant été bref, Thoutmosis III accéda au trône très jeune (5 ans). C'est Hatchepsout, sa belle-mère, qui joua le rôle de régente.


Hatchepsout devint alors la femme forte du pouvoir, sans totalement faire ombrage ou écarter le jeune pharaon. Elle initie d'importants travaux et arrive à contenir une menace.


Mais Hatchepsout finit par accéder au couronnement et à passer de régente à la position de reine, peut-être pour des raisons pratiques ou politiques. Le jeune roi tomba dans l'ombre et fut tenu à l'écart du pouvoir et des manifestations publiques. Il ne reprendra pleinement ses fonctions qu'à la mort d'Hatchepsout.


Mais le plus frappant est que cette femme quasiment toute-puissante arborait quand même des attributs masculins lors des cérémonies. On parle par exemple de port du pagne, de sa coiffe et même d'une fausse barbe! Comprenez bien qu'on parle de "la première grande femme dont l'histoire ait gardé le nom".


Pour enfoncer le clou, à son décès, Thoutmosis III, petit garçon devenu grand, décida de tirer sa revanche. Sa frustration était certes compréhensible, mais il poussa le bouchon jusqu'à tenter d'effacer la mémoire de cette grande femme. Seules quelques rares statues et traces d'elle subsisteront (heureusement).


La leçon que je voulais mettre en lumière avec cette histoire est que le pouvoir n'est pas la liberté. Il ne peut casser nos chaines. Seul un effort mental peut le faire. "La liberté est un état d'esprit" (Paul Valéry).


Rousseau nous mettra en garde contre l'idée que la liberté serait le droit de tout faire. Un tyran, même investi de tous les pouvoirs, n'est pas nécessairement "plus" libre que ses sujets.


Hatchepsout, malgré son intelligence et son agentivité et malgré une société égyptienne dans l'Antiquité relativement moins soumise au patriarcat, même avec tout son pouvoir, se sentait tout de même tenue d'arborer des attributs masculins dans les cérémonies.


Certes, on peut penser que la liberté c'est aussi la possibilité de choisir ses contraintes. Si une femme veut se comporter "comme un homme" (encore que tous les hommes ne se comportent pas de la même façon), elle n'est pas (nécessairement) moins libre pour autant.

Si une personne libre choisit de rester attachée à certaines traditions (quitte à porter une barbe postiche), cela ne fait pas d'elle une esclave de la tradition.


Mais il faut reconnaitre que la ligne est parfois mince entre liberté liberticide et liberté libératrice.


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